Les témoignages recueillis

Une de nos motivations à montrer les fours au public est bien de témoigner du travail de nos anciens.

Nous avons pu questionner certains d’entre eux et les questions que tout le monde se pose sont sans doute :

  • Comment pouviez vous garnir le four de pierres et de charbon alors qu’il expulse des fumées à 900° ?
  • Le site était en permanence envahit de fine poussière de chaux en suspension, très corrosive ?
  • Sans compter les particules de chaux vive en quête de la moindre goutte d’eau, de sueur, de larme ou de salive ?
  • De quelles protections disposiez-vous ?

Leurs femmes découpaient de vieux draps de lin en bandes qu’ils enroulaient autour de leurs bras … le mouchoir à carreaux noué sur la bouche … une cuillerée d’huile bien mâchée pour tapisser les muqueuses … les yeux étaient secs et rougis, la peau bien tannée, mais à leur dire, ce n’était pas plus dur que le métier de paysan de cette époque.

  • Comment pouviez vous être surs que le calcaire s’était bien changé en chaux et bon à défourner ?

La seule méthode consiste à écouter !! L’air frais et humide accéléré par la cheminée rencontre les premiers blocs plus ou moins coincés entre eux et ceux-ci aspirent l’humidité avec un chuintement caractéristique.

  • A quoi ressemble un bloc de chaux ?

Le bloc de chaux a la même forme que le bloc de calcaire initial, quasiment la même couleur mais son poids a diminué de 40% et c’est perceptible dans la main. 40% de la pierre calcaire est du CO2 piégé relibéré dans l’atmosphère.

Nos visiteurs témoignent eux aussi des usages de la chaux par leurs parents ou grands-parents.

  • Les œufs d’été gardés pour l’hiver dans un bain de lait de chaux : la chaux éteinte mélangée à de l’eau donne une suspension appelée lait de chaux, de PH 12.6 c’est un puissant bactéricide et une seconde peau protectrice pour les œufs qui restent frais. Mais les blancs sont paraît-il impossibles à monter en neige, à vérifier.
  • Le séchage exprès des jambons à la chaux vive n’est pas évoqué sans appréhension, il faut du doigté et de l’expérience sinon le jambon est trop sec. Par contre la conservation des saucissons avec un poudrage de chaux éteinte semble mieux maîtrisée.
  • Le même lait de chaux servait à badigeonner les murs des étables et même ceux des habitations : beaucoup de maladies évitées.
  • «Qui chaule sans fumer se ruine sans y penser » : dicton de la montagne au-dessus de Chauffailles qui n’est pas sans bon sens. Le chaulage neutralise le PH des sols acides d’origine granitique, c’est l’intérêt principal mais permet aussi de fixer les engrais pour que les pluies ne les lessivent pas dans ces terrains sableux.
  • « Le chaulage enrichit le père et ruine le fils » invite à la prudence : la chaux est épandue en petite quantité tous les 4 ou 5 ans seulement car elle fixe le engrais, ce qui enrichit le père, mais extermine aussi toute la faune microbienne du sol, ce qui ne manquera pas de gâter l’héritage. Il faut donc laisser au sol le temps de régénérer sa faune microbienne.
  • La chaux vive permet d’enterrer les cadavres d’animaux (ou d’humains) sans empoisonner les eaux : composés de 75% d’eau, nos tissus et notre faune microbienne sont desséchés par la chaux vive.
  • Les eaux usées sont assainies par la chaux éteinte
  • Et tous nos murs de maison maçonnés en chaux sont évoqués pour leur impression de confort. C’est que la chaux laisse passer l’air, retient ou restitue l’humidité, retient les gaz polluants.
  • Et on ne peut rien cacher à nos visiteurs : un Normand nous apprend qu’une congrégation de religieuses a une dispense pour les sœurs décédées : le corps est traité à la chaux vive, les ossements sont ensuite inhumés dans leur crypte.